Véhicule autonome 

Services et Infrastructures

La voiture autonome désigne un véhicule roulant sans conducteur, ni intervention humaine, seulement guidé par des algorithmes et des capteurs qui lui permettent d’interagir avec son environnement, et de prendre les décisions de conduite. Cet objet technologique popularisé depuis le lancement des expérimentations des géants du numérique comme Tesla et Google dans les années 2010 est en réalité un rêve ancien de l’industrie automobile. Dès les années 1920, des ingénieurs testaient des véhicules contrôlés à distance dans les rues de New York. En 1939, l’exposition Futurama sponsorisée par General Motors lors de l’exposition universelle de New York proposait une vision de la ville en 1960, dans laquelle des véhicules roulaient sans intervention humaine sur un réseau d’autoroutes urbaines. Le développement technologique dans le domaine de l’électronique à partir des années soixante (Norton, 2021) puis dans le domaine de l’intelligence artificielle ces dernières années a favorisé le lancement d’expérimentations de véhicules autonomes.  

 

Derrière le terme de « véhicule autonome », qui sous-entendrait une absence totale d’intervention humaine, se cache néanmoins un.e humain.e qui change de place. De conducteur.ice, iel devient superviseur.e. La Société des Ingénieurs de l’Automobile (SAE) défini cinq niveaux d’automatisation :  

 

  • Niveau 0 : pas d’automatisation de la conduite (une Citroën 2CV ou une R5 par exemple) ; 
  •   Niveau 1 : assistance de conduite (régulateur de vitesse) ; 
  •   Niveau 2 : automatisation partielle de conduite (Tesla Autopilot qui peut changer de voie tout seul)​ ;​ 
  •   Niveau 3 : automatisation de conduite conditionnelle (« sans les mains » mais avec un conducteur qui doit rester vigilant – ce qui risque de poser problème pour l’interaction homme-machine, car comment engager l’attention sans action ? (Kim, 2022))​ ;​ 
  •   Niveau 4 : automatisation élevée (« sans les mains, sans les yeux » : il n’y a plus besoin de conducteur dans le véhicule, mais la supervision humaine est toujours nécessaire pour reprendre la main sur certaines opérations. Le véhicule ne peut opérer que dans certaines zones en utilisant le géogardiennage (lien vers la notice) ; c’est le niveau visé dans la stratégie française et européenne) ; 
  •   Niveau 5 : automatisation totale (le véhicule est capable de rouler sans intervention humaine dans toutes les conditions.​ C’est​ le rêve ultime du véhicule autonome, mais qui est bien loin de pouvoir se réaliser (Litmann, 2023)). 

 

Le véhicule autonome pourrait donc être l’aboutissement d’une dynamique engagée depuis les années soixante d’amélioration des systèmes d’aides à la conduite (ADAS) dans le secteur automobile ; ou la transposition sur la route d’une logique déjà en cours dans le secteur du ferroviaire, avec l’automatisation de lignes de transport. Au-delà du véhicule, le véhicule autonome s’appuie sur une infrastructure connectée (capteurs, caméras) avec laquelle il interagit et ​sur ​une supervision à distance. Néanmoins, ​la question de savoir ​qui du véhicule ou de l’infrastructure doit être le plus équipé en capteurs et autres caméras n’est pas encore tranché​e​.  

 

Les chercheur.es du LVMT s’intéressent depuis plusieurs années aux transformations que pourrait occasionner ce nouvel objet. Gaële Lesteven et Mariane Thébert ont travaillé sur l​a place ​​     ​​du​ véhicule autonome​ dans les médias​, pointant l​e poids​ des constructeurs automobiles dans la ​production de discours ​​autour​ de cette technologie (2022). Thomas le ​G​allic et Anne Aguiléra ont conduit une revue de littérature pour analyser les impacts potentiels du véhicule autonome sur la mobilité et les modes de vie (2019). Félix Carreyre s’intéresse dans sa thèse aux impacts socioéconomiques du véhicule autonome dans différents types de territoire (LIEN), un sujet exploré également par Nicolas Coulombel et Tatiana Seregrina dans le projet SAM (lien). Alors que le véhicule autonome a bénéficié d’une large publicité ​concernant​ses potentiels effets positifs sur la congestion, la sécurité, le report modal entre autres, Natalia Kotelnikova-Weiler a travaillé sur l’analyse de cycle de vie pour en évaluer les impacts environnementaux (projet SAM). Le véhicule autonome risque d’entraîner une transformation des métiers du transport, que ce soit ce​ux ​de ​la conduite​ (de bus, de taxi, de VTC, etc.), de l’accueil, de la réparation, etc. Plus largement, le développement de la mobilité automatisée viendra peut-être bousculer la définition des services de mobilité, leurs modèles économiques et leur gouvernance (projet SAM).  

 

Bien que n’étant pas encore une technologie mature, même si certains services sont déjà déployés aux Etats-Unis, le véhicule autonome est soutenu par des politiques nationales en Europe, aux Etats-Unis et en Asie de l’Est (Chine, Corée, Japon). Ces politiques donnent à voir les orientations que pourra prendre le développement de la mobilité autonome, du véhicule particulier au transport public. En France, la stratégie nationale porte la vision d’un mode partagé de niveau 4, qui doit s’inscrire dans les démarche​s​ nationale et locales de réduction des émissions de polluants du secteur de la mobilité. Le véhicule autonome s’inscrit néanmoins dans une vision technophile des transitions des systèmes de mobilité, et reste actuellement à un stade expérimental.  

 

Références :

– Kim TH., 2022, “Transformation of Automobility as a Mobility Infrastructure: Autonomous Vehicle and Human Lived Experiences”, 2022 Global Mobility Humanities Conference, 28-29 octobre 2022, Konkuk University. 

– Litman T., 2023, Autonomous vehicle implementation predictions, rapport, Victoria Transport Policy Institute, 49 p. 

– Norton P., 2021, Autonorama: the illusory promise of high-tech driving. Island Press.